Guet des veilleurs ou les truands – 1480

Cette chanson, cueillie dans le Nouveau Dictionnaire complet du jargon de l’argot ou le langage des voleurs dévoilés (Halbert d’Angers), 1848, rare petite plaquette, « a été faite par un écrivain distingué, qui a eu le malheur d’être trop longtemps privé de sa liberté, pour avoir cru à celle de la presse ». Elle est imitée du chapitre de Notre-Dame-de-Paris, par Victor Hugo. Air de Tempête, de Lolsa Puget I D’Orsiny débride sa taverne, Rappliquez, ribaux, truands et goualeurs, Le soudard qui r’mouche à la poterne Pourrait allumer les chourineurs. Au loin le couvre-feu sonne, Narquois, renquillons sans bruit ; Icigo, l’on piqu’te et chansonne Et l’on peut y sorguer la nuit. Refrain Saisissons, mes frères, Nos bouteilles et nos verres ; Doublons nos glouglous, Saisissons, mes frères, Nos bouteilles et nos verres ; Truands et chourineurs, Narguons, gais trouvères, Au cliquetis des verres, Le guet des veilleurs.   II Gais goss’lins de la cour des miracles, Que Pantin bagoule bohémiens ; Ci-go l’on maquille les oracles, Pour les béotismes parisiens. Nous rions de la sanglade, Pigeant les bons archers du roi, La nuit nous faisons bambochade, Le jour le truc a son emploi. III Balafos et tambourins d’Egypte Détonnez vos rigolos accords ; L’ogive ni l’orgueilleuse crypte De ces lieux ne forment les accords, Buvons, fêtons, hubins et piètres, Notre frangine Esmeralda, Demain nous verrons des fenêtres Tomber la buona-mancia. IV De Frolo fait pigé l’escarcelle, Ce chanoine qui fait le rupin, Remouquez, du flan ! comme elle est belle, Avec ça l’on singe le malin. Versez, de par tous les diables, Capons, éclopés, sans taudis. Soyons injusticiables Pour quelques livres parisis. V Coquillards et courtauds de boutanche, Rifodés, marcaudiers et cagoux, Le grand Coesre a dit : « Trêve à la manche » Sabouleux, calots et francs-mitoux, Nommons pape de la fête Quasimodo le sonneur ; De fleurs couronnons sa tête, Noël au peuple malingreur. I. — D’Orsiny ouvre sa taverne — Accourez, voleurs, souteneurs, chanteurs — Le soldat qui regarde à la poterne — Pourrait apercevoir les assassins... — . . . — Soldats, voleurs, entrons sans bruit — Ici l’on boit et l’on chansonne — Et l’on peut y dormir la nuit. II. — Gais enfants de la Cour des Miracles — Que Paris nomme Bohémiens — Ici l’on fait des oracles — Pour les Parisiens ignorants — Nous rions des coups de verges — . . . — . . . — . . . III. — Balafos et tambourins d’Egypte (anciens instruments) — . . . — . . . — . . . — Buvons, fêtons, gueux (hubin, chien ; classe de gueux qui se disaient mordus par un chien ou loup enragé et prétendaient avoit fait le pèlerinage à Saint-Hubert) et faux estropiés (piètres, classe de gueux qui marchaient avec des béquilles). — . . . — . . . — Tomber l’aumône. IV. — . . . — Ce chanoine qui fait le riche — Regardez, ce n’est pas vrai, comme elle est belle — . . . — . . . — Filous, éclopés, sans logis. — . . . — . .. V. — Tricheurs et voleurs de boutiques (en français, courtaud de boutique désignait le gros commis ou marchand) — Ruinés par le feu, prétendus marchands, lieutenants de gueux — Le roi des gueux a dit : « Trêve à l’aumône ! » — Faux épileptiques, faux teigneux, gueux contrefaisant les malades — . . . — . . . — . . . — Noël au peuple de faux malades. Jean Graven - L’argot et le tatouage des criminels - 1962