Puisque Jean Richepin, mon excellent camarade et confrère, a nommé dernièrement dans ses articles Astezani, je veux, en souvenir de l’intérêt que nous inspira jadis cette ébauche macabre, essayer d’en évoquer la silhouette tordue et touchante.
Je l’ai peint d’ailleurs, autrefois, grattant sa mandoline, assis au milieu des fleurs, et j’ai conservé la toile ; il est là devant moi, tandis que je noircis ce papier ; il me regarde écrire.
Il doit être peu de Parisiens de ma génération, j’entends des Parisiens de la rive gauche, des amoureux de l’Odéon et du Luxembourg, de ce beau quartier paisible, parfumé, naïf, où mourut Michelet, où vieillit Sainte-Beuve, où Hugo fut jeune, où l’enthousiasme naît, où se repose la gloire ; il doit être, dis-je, peu de mes contemporains qui n’aient, le soir, en ces dernières années, tressailli, sursauté même en apercevant tout à coup dans l’ombre, à hauteur des genoux, une sorte de gnome transparent, surmonté d’un chapeau de haut tuyau, semblable à un poêle en marche.
- Le nain Delphin, chanteur montmartois - Agence Meurisse - 1919
- Vue prise au n° 58 rue Damesme à la butte aux Cailles, au fond à gauche le parc Montsouris - Jules-Antoine Chauvet - 1894